Le business sur la misère
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La Banque mondiale (BM) vient de sortir un rapport qui souligne, pour le secteur privé, le marché que représente la pauvreté. Selon ce rapport, 4 milliards de pauvres disposeraient globalement de 5 000 milliards de dollars. Quelle aubaine pour les groupes privés !!! On reconnaît bien là l’institution internationale au service du capital. Après les conséquences catastrophiques des programmes d’ajustement structurel imposés aux pays en développement avec la complicité du Fonds Monétaire International et des bourgeoisies locales, la BM tente d’ouvrir de nouveaux marchés aux appétits des multinationales. Pense-t-elle ainsi s’exonérer de sa responsabilité dans l’approfondissement de la pauvreté, le scandale de la dette, la casse des politiques publiques, notamment agricole, en faisant croire que les pauvres peuvent être moins pauvres s’ils ont accès aux produits ?
La BM s’est attachée à quantifier le pouvoir d’achat des personnes dont les revenus annuels ne dépassent pas 3 000 dollars par an (soit 3,35 $ par jour au Brésil, 2,11 en Chine, 1,89 au Ghana ou 1,56 en Inde). Ce qui exclu les 1,2 milliard de personnes qui vivent avec moins de un $ par jour. Et la BM d’expliquer que le secteur privé devrait s’adresser à cette population, dont une bonne partie du marché structuré de manière informelle, leur échappe.
Le cynisme comme morale du talon de fer ! Les groupes de l’agroalimentaire s’engouffrent dans la brèche. Il faut dire que dans ce marché des pauvres, l’alimentation pèse pour 2 900 milliards de $. Nestlé s’installe au Brésil, dans le Sertao, une des régions les plus pauvres du pays dans laquelle les paysans se vendent aux grands propriétaires terriens pour essayer de survivre. Le premier groupe agroalimentaire mondial y produit et distribue des « produits à prix populaires ». Danone au Bangladesh s’associe à la Grameen Bank, promoteur du microcrédit, pour produire et vendre des yaourts à 5 ou 6 centimes d’€ le pot et les faire distribuer par les femmes des villages. L’objectif des deux groupes est le même : la fidélisation de populations aujourd’hui hors circuits de consommation. Loin d’être désintéressés, ils reconnaissent investir dans des projets rentables. « On peut faire du business au service de la pauvreté »